lundi 25 février 2008

Crise des subprimes : le révélateur de la faillite d'un système



Née aux Etats-Unis, la crise des subprimes a pris une ampleur internationale à l’été 2007 et n’en finit plus d’agiter l’économie mondiale. Cette crise financière et boursière est d’autant plus ravageuse et choquante qu’elle a pour origine une exploitation assez incroyable de la misère. Ainsi, à partir de 2001, des prêts dits « à risque », accordés à une clientèle modeste, voire peu solvable, se sont multipliés. Des commerciaux intervenant à domicile jusque dans les quartiers pauvres se sont mis à proposer à une grande échelle des crédits à des taux, souvent variables, mais toujours majorés par rapport à un prêt classique.
Les plus modestes des ménages américains, immigrés, minorités ou familles mono-parentales surtout, étaient les cibles privilégiés d’officines qui cherchaient surtout à faire du chiffre avant de placer les créances sur les marchés obligataires. Mais ce racket a fait long feu, d’une part parce que les taux promotionnels des premiers mois laissaient place à des taux bien plus prohibitifs et d’autre part, parce que la Fed, Banque Centrale américaine, a peu à peu augmenté ses taux directeurs (sur lesquels étaient basés les taux d’emprunt) entre 2004 et 2006 (de 1% à 5,25%).
Les défaillances des emprunteurs se sont alors multipliées et les organismes financiers n’ont plus été en mesure de se rembourser avec la vente des biens saisis puisque le marché immobilier américain a baissé en moyenne de 20%. Cette insolvabilité a ainsi mis dans la rue de nombreuses familles (1 à 3 millions de personnes touchées à terme selon la Commission Bancaire du Sénat américain !) et provoqué la faillite de plusieurs entreprises de prêts hypothécaires à risque.
Ce premier mouvement de crise a ensuite eu son contrecoup puisque les actionnaires de ces établissements spécialisés dans les prêts à risque étaient le plus souvent des filiales des banques et que ces grandes banques, comme les fonds d’investissements, s’étaient lancés massivement dans la spéculation sur ces titres risqués mais très rémunérateurs. Cette situation incertaine a alors conduit à une défiance des banques les unes envers les autres et à un assèchement progressif mais préoccupant des crédits disponibles malgré les interventions des banques centrales.
Tous les ingrédients d’une contagion à l’économie réelle étaient alors réunis avec des annonces de pertes colossales pour les établissements financiers, une augmentation des taux d’intérêts et une difficulté accrue pour investir de la part des entreprises et pour consommer de la part des particuliers.Au-delà des drames individuels vécus par les victimes initiales de cet emballement du Capitalisme Financier on peut être légitimement choqué par l’épilogue de la crise au cours de laquelle on applique l’adage « privatiser les bénéfices et socialiser les pertes ». Ainsi, après l’intervention massive des Banques Centrales pour compenser les excès de quelques-uns, on aboutit comme dans le cas de la Banque anglaise Northern Rock à une intervention coûteuse et imposée de la puissance publique pour éviter une nouvelle amplification de la crise.

lundi 18 février 2008

Enseigner la Shoah à l'école



Dans son activisme habituel, toujours destiné à éviter que l'agitation médiatique ne cède la place à un réel bilan de son action, le Président de la République a proposé la semaine dernière à Périgueux d'imposer aux enseignants une nouvelle façon d'enseigner la Shoah. De nombreux pédagogues, pédo-psychiatres ou anciens déportés, comme Simone Weil, qu'on ne peut pourtant pas taxer d'anti-sarkozysme, se sont rapidement émus des conséquences d'une telle décision sur l'équilibre des élèves, tout en doutant de l'utilité de cette démarche pédagogique compassionnelle.
L'un des arguments avancés tient évidemment à l'âge des enfants (10 ans). En effet, beaucoup craignent le traumatisme qui pourrait affecter ces élèves auxquels il est demandé de confier la mémoire d'une jeune victime du nazisme. Mais certains historiens, comme Annette Wieviorka, auteur notamment du très pertinent Auschwitz expliquée à ma fille, vont plus loin dans la condamnation et jugent que le jeune âge n'est qu'un facteur aggravant. Ils estiment que "jumeler un enfant vivant avec un enfant mort, donner à un vivant la charge d'un fantôme" n'est un cadeau ni pour ces élèves de CM2 ni pour la mémoire de cet épisode dramatique de la seconde guerre mondiale.
On peut ainsi qualifier l'initiative du Président de la République de nouveau "coup mémoriel" comme l'avait été l'épisode de la lecture imposée de la lettre d'adieu du jeune résistant communiste Guy Môquet. Là encore, ces injonctions politiques désordonnées, sans logique pédagogique autre que l'entretien du nuage de fumée médiatique, semblent néfastes à l'apprentissage de l'Histoire. Le Génocide Nazi fait déjà l'objet de leçons, de lectures, de films, de visites de musées, de rencontrent avec des survivants au cours de la scolarité il n'est pas nécessaire ni souhaitable d'ajouter à ces outils de compréhension une charge émotionnelle qui peut s'avérer insupportable pour ces jeunes.
Plus profondément cette polémique, succédant à d'autres comme celle sur la laïcité après les discours du Président de la République à Sain-Jean-de-Latran et à Riyad, illustre la tendance de Nicolas Sarkozy à s'occuper de tout et surtout de ce qui peut détourner les Français de leurs préoccupations économiques et sociales. Là encore le consensus républicain est battu en brèche lorsque le Président oublie qu'il y a des enseignants, qu'il y a des inspecteurs de l'Education Nationale, qu'il y a un Conseil National des Programmes. Alors Monsieur le Président faites confiance aux enseignants, respecter les procédures de concertation et les fondements de la République française !

samedi 16 février 2008

Grève dans l'audio-visuel public




Aujourd'hui, l'ensemble des syndicats et une part exceptionnellement importante des salariés du groupe France Télévision ont entamé une grève et défileront cet après-midi dans les rues de Paris.
Au delà des "stars du petit écran" qui ont fait le choix, courageux, de suivre le mouvement, nous assistons à l'expression d'une profonde inquiétude qui fait suite aux déclarations controversées du Président de la République lors de sa conférence de presse de rentrée le 8 janvier 2008.
Il a déclaré, à cette occasion, vouloir en finir avec la publicité sur les chaînes du service public. Intention louable, mais particulièrement inquiétante étant donné qu'aucunes garanties n'ont été donné quant à l'origine et au montant des budgets qui seront alloués à France Télévision. A l'heure actuelle, c'est un budget de 1,2 Milliards d'euros qu'il faudra financer. Cette somme considérable ne peut assurément être trouvée du côté d'une augmentation de la redevance au regard du peu de pouvoir d'achat dont bénéficient encore les français.
Nicolas Sarkozy a évoqué des nouvelles taxes sur certains produits et matériels sans pour autant apporter plus de précisions. Le Gouvernement ne sait même pas aujourd'hui quels montants ces nouvelles taxes pourraient rapporter. Cette attitude révèle la légèreté avec laquelle Nicolas Sarkozy semble avoir abordé ce sujet. Il voulait faire un effet d'annonce, encore une fois, mais sans avoir d'élèments chiffrés ou de perspectives claires.
La perspective d'un système audio-visuel à la Berlusconi se rapproche dangereusement et remettrai, encore une fois, gravement en cause l'expression d'une presse de moins en moins libre et de plus en plus mise sous pression. Si le groupe France Télévision venait à devoir fermer faute de budgets suffisants, le seul bénéficiaire serait le témoin de Nicolas Sarkozy lors de son précédent mariage, à savoir, M. Bouygues, propriétaire de TF1. Ses actions ont déjà fait un bond suite à l'annonce du Président de la République à la perspective de rentrées publicitaires supplémentaires, s'il se paye son plus sérieux concurrent, France Télévision, il pourra offrir une ou deux rollex de plus à Nicolas Sarkozy pour le remercier.
Pour continuer à bénéficier d'un service public de l'audio-visuel de qualité, qui continuera à faire la promotion d'oeuvres culturelles, d'informations mais aussi de divertissements à la hauteur de ce qu'attendent les français, il est indispensable de prévoir des financements pérennes permettant au groupe France Télévision de se projeter dans l'avenir. C'est pour ces raisons que je souhaite aujourd'hui, exprimer mon soutien sans réserve au mouvement de grève chez France Télévision et je compte porter leur revendication au sein du Parlement dès que le Gouvernement nous autorisera à avoir un débat à ce sujet...

vendredi 8 février 2008

Plan Banlieues : Sarkozy loin du compte !



Le Plan banlieues était présenté ce jour à grands renforts médiatiques. Comme il fallait s'y attendre, la montagne a accouché d'une souris et les espoirs des habitants des quartiers risquent d'être une nouvelle fois déçus.

De fait, au prétexte des insuffisances des politiques urbaines et surtout du fait de l’étroitesse de ses marges de manoeuvre, le Président de la République propose tout bonnement de ne plus s’occuper des quartiers sensibles pour privilégier, selon lui, les personnes qui y vivent. Curieuse façon de distinguer le quotidien des citoyens, de leur cadre de vie le plus proche.
Pire, à défaut d’annoncer le moindre chiffrage de son plan banlieues, Nicolas Sarkozy préconise une sélection affinée des quartiers bénéficiant d’aides et une surveillance accrue des moyens utilisés. Le Président de la République se place comme trop souvent sur le terrain du discours et des annonces plutôt que sur le celui des actions concrètes.
Il propose par exemple un vague et illusoire contrat d’autonomie. Celui-ci se limite à confier un suivi des jeunes en recherche d’emploi à des entreprises d’insertion privées avec une hypothétique bourse à l’échéance. Après avoir fait voter une réforme du service public de l’emploi institutionnalisant un marché du travail à deux vitesses, le chef de l’Etat souhaite livrer les jeunes aux seules entreprises de placement qui n’ont pas fait la preuve de leur efficacité. Il ne propose rien pour lutter contre l’échec scolaire dans l’enseignement supérieur dont la principale cause reste l’obligation de cumuler emploi et études. Il ne propose rien non plus pour faciliter l’accès des jeunes à un logement digne, première marche vers l’autonomie.
La vision qu’il nous propose est profondément élitiste et oublie la majorité des citoyens. Etablissements privés dans les quartiers, classes prépas pour les 5% les meilleurs, Ministres issus de l’immigration au Gouvernement, autant de propositions symboliques qui ignore le plus grand nombre de ceux qui restent sur le bord du chemin. Il sacrifie également le service public d’enseignement au profit d’une hypothétique école de la seconde chance. L’enseignement privé semble être la seule voie d’excellence pour Nicolas Sarkozy puisqu’il supprime 17000 postes d’enseignants en 2008 et abandonne ainsi enseignants et élèves.
Nous attendions du Président de la République des mesures fortes, budgétées sur le rééquilibrage financier entre villes pauvres et villes riches, sur la fiscalité locale t la dotation urbaine. De même, les effets d’annonce autour du plan banlieues avaient suscités de vrais attentes chez les habitants des quartiers : c’est aujourd‘hui pour eux comme pour nous une vraie déception.

jeudi 7 février 2008

Attali ou Attila ? Là où il passe la solidarité ne repousse pas !


Le rapport Attali ou le libéralisme pour les nuls…
L’ancien sherpa de François Mitterrand a récemment remis un rapport au Président. En 250 pages et plus de 300 propositions, ce désormais fameux rapport énumère sans hiérarchie véritable, souvent des poncifs, quelquefois de solides préjugés idéologiques, et parfois des mesures qui méritent un examen approfondi. Ce bloc où selon son architecte principal « tout se tient », décrit-il la seule politique efficace possible ou une option parmi plusieurs ?
Il existe aujourd’hui une tendance lourde qui vise à soustraire des sujets toujours plus nombreux à l’examen critique, au crible du débat contradictoire et à conclure à l’archaïsme du clivage gauche/droite. On finit par se convaincre qu’il existerait une réalité objective, décrite par ceux qui savent, les experts. Conséquence de ce « diagnostic unanime », les solutions (les politiques) ne pourraient différer que sur le dosage ou le rythme, pas sur leur nature.
Pourtant, ce document doit être lu pour ce qu’il est : un parti pris politique évident en faveur des recettes ultra-libérales classiques. Cela le rend-il moins sérieux ? À l’évidence non. Cela le rend-il moins légitime ? À l’évidence oui. D’autres experts ont fait, à partir des mêmes chiffes, des constats différents. Ils en ont déduit d’autres politiques. Le champ économique même mondialisé propose des options radicalement différentes au choix des citoyens. Notre rôle est de rappeler par cette contre-expertise que ce choix existe.
Les contre-propositions des Socialistes pour la croissance
D’un point de vue macroéconomique, la faiblesse devenue chronique de la croissance française
est due, en grande partie, à la panne d’investissement des entreprises. Elle est également aggravée par la baisse du pouvoir d’achat des ménages modestes. De fait, la croissance est tirée par la consommation des classes aisées, bénéficiaires de l’accroissement des inégalités et des choix fiscaux du Gouvernement (bouclier fiscal). Mais cette politique rencontre des limites, dans la mesure où la propension à consommer des ménages à hauts revenus est faible. Il en résulte une situation de croissance molle, accompagnée d’un chômage persistant et de déficits publics chroniques, compte tenu de l’insuffisance des rentrées fiscales.
Les Socialistes ont formulé un certain nombre de propositions ambitieuses pour parvenir à une hausse des salaires et à une relance de l’économie :
- augmenter le SMIC à au moins 1500 euros mensuels au cours d’une législature.
- ouvrir un vaste mouvement de négociation salariale dans le secteur privé et dans le secteur public afin que les partenaires sociaux parviennent à un accord de hausse des grilles de rémunération (avec une intervention législative en cas d’échec des discussions)
- conditionner les exonérations fiscales et sociales accordées aux entreprises (20 milliards d’euros par ans) à des engagements fermes en terme d’embauche et de salaires.
- transformer la prime pour l’emploi en allègement de cotisations sociales payées par les salariés. Ce qui augmentera d’autant leur salaire net.- favoriser l’investissement productif : l’intensité de la croissance dépend de la capacité d’innovation et de renouvellement de notre appareil de production comme de la vitalité des services de l’économie.

mardi 5 février 2008

Rugby et politique ?


Peut-on tirer des enseignements politiques d'un match de rugby ?

Ce week-end, le XV de France jouait en Ecosse pour le 1er match du tournoi des VI Nations 2008. Cet événement sportif était marqué par les débuts d'un nouveau trio de techniciens à la tête de notre sélection nationale. Après l'échec sportif de la coupe du monde en France, dont le remarquable succès aurait pu être magnifié par un meilleur parcours des bleus, l'attente était grande au vu des changements tactiques annoncés.
7 ans d'une stratégie musclée, défensive, bridant les initiatives et le jeu au large devaient laisser place à un jeu de mouvement, moins stéréotypé et renouant avec l'offensive. Le risque était grand de voir les ambitions ruinées par une mauvaise entame à Murrayfield. Certains commentateurs estimaient même que le rugby moderne ne permettait plus les envolées de trois quart.
Il n'en a rien été et la victoire a été au rendez-vous, doublée du plaisir évident des joueurs et de celui, retrouvé, des spectateurs. IL EXISTE BEL ET BIEN UNE AUTRE FACON DE JOUER AU RUGBY. Cette bouffée d'air frais peut sans doute être transposée à la politique. Depuis de trop nombreuses années on tente de nous faire croire qu'il n'existe plus qu'une seule façon de faire de la politique. Des experts arguent de l'archaïsme du clivage gauche/droite et tentent de convaincre qui veut bien les entendre qu'il faut moderniser et que les recettes ultra-libérales ne constituent pas des choix politiques mais une voie unique qui serait incontestable.

Dernier exemple de cette pensée unique, le rapport Attali. En 250 pages et quelques 300 propositions, sont énumérées sans hiérarchie des mesures parfois intéressantes, souvent provocatrices et toujours marquées par un parti pris politique évident. Il justifie les orientations prises par votre Gouvernement et préconise de nouveaux reculs : individualisation de la protection sociale, limitation des solidarités collectives, baisse aveugle et forcenée des dépenses publiques, suppressions de poste de fonctionnaires, allongement de la durée du travail, modération salariale, concurrence exacerbée, déréglementation et privatisation, application sauvage des standards d'une mondialisation financière toujours plus ravageuse pour les hommes et la planète…
Dans ce bréviaire ultra-libéral chaque consommateur français devient l'artisan de la remise en cause de ses propres droits et des ses propres protections. Pourtant, s'il faut peut-être adapter notre modèle social au nouvel environnement économique, il n'est pas évident que la direction vers laquelle le rapport Attali nous invite à nous enfoncer soit la plus juste socialement, et encore moins la plus efficace économiquement.
Ne serait-il pas plus utile et efficace de remédier à l'inquiétante panne d'investissements productifs des entreprises, de freiner la course aux dividendes qui fragilise des sociétés pourtant compétitives et rentables et de mieux répartir les richesses. De fait, au moment où un krach boursier fait disparaître des milliards de capitalisation boursière en quelques jours ; au moment où une banque avoue pouvoir perdre 5 milliards d'euros sans remise en cause de sa direction ; au moment où les délocalisations continuent de frapper de nombreuses entreprises la vrai réforme économique nécessaire est simple. Elle consiste à rendre du pouvoir d'achat au plus grand nombre.

On le voit bien, en matière économique aussi UNE AUTRE POLITIQUE EST POSSIBLE. Une politique où les marges de manœuvres ne sont pas gâchées par des cadeaux fiscaux colossaux aux nantis. Une politique qui ne laisse pas le marché tout régenter. Une politique qui donne la priorité au collectif, à la solidarité et à la cohésion… des valeurs qui ne sont pas seulement celles du rugby !